Taïwan-Chine : Regards croisés

Histoire, mémoire, espaces d’altérité

Souvenirs de...

Après avoir présenté, depuis 2020, cinq histoires illustrées donnant forme aux récits mémoriels de la génération des années 80, la rubrique « Taïwan-Chine : Regards croisés » évolue pour devenir un livre illustré, accompagné de notices historiques, paru au cours du premier semestre 2023 aux Éditions You Feng (Paris).

 

Livre disponible sur le site Éditions You Feng
Taiwan-Chine, Imaginaires croisés, Samia Ferhat, French Taïwan Studies

Samia Ferhat, Taïwan-Chine : Imaginaires croisés – 海峽兩岸—想像交織的記憶, Paris : Éditions You Feng, 2023, 271p., ISBN : 979-10-367-0194-8.

Ce livre est une édition en deux langues : français et chinois.

Avant-propos

 

 

De retour à Paris après presque dix années de vie à Taïwan, j’eus l’occasion, au début des années 2000, d’observer pour la première fois des interactions entre jeunes Chinois et Taïwanais. Celles-ci se tenaient principalement au sein des institutions dans lesquelles j’enseignais. Peu nombreux, il y avait néanmoins toujours deux ou trois étudiants venus de Chine et de Taïwan dans mes classes. Les étudiants chinois manifestaient en général beaucoup de curiosité à l’égard de la société taïwanaise, certains revendiquant même un lien affectif privilégié avec sa population. À cette revendication d’une proximité affective, les jeunes Taïwanais opposaient généralement le constat d’un profond fossé qui les séparait les uns des autres.

C’est afin de comprendre ce différentiel de perception que j’ai mené à partir de la fin des années 2000 plusieurs expérimentations scientifiques, dont des entretiens réalisés auprès d’une soixantaine de jeunes Chinois et Taïwanais nés dans les années 1980. J’ai alors recueilli de nombreux récits, qui non seulement évoquaient divers épisodes de la mémoire familiale et individuelle, mais rendaient aussi compte d’expériences d’interaction avec celles et ceux venus de l’autre côté du détroit.

Ce sont neuf de ces récits que nous découvrons dans  ce volume : ceux de Ayuan (阿远), Aji (阿吉), Awang (阿旺), Xiaoying (小英), Xiaomei (小妹), Xiaoyu (小玉), Xiaotong (小彤), Awen (阿文) et Xiaolan (小蘭). Les dessins de L.H., tout en nous plongeant dans leur imaginaire historique et mémoriel, nous permettent aussi de saisir la sensibilité de leur époque. Toutefois, les récits de ces jeunes sont à considérer comme des narrations mémorielles nourries des souvenirs entendus de leurs aînés, ou de leurs propres expériences personnelles ; ils n’ont aucunement vocation à « dire l’histoire ». C’est pourquoi, la troisième partie de cet ouvrage présente dix notices rédigées par des spécialistes de la Chine, de Taïwan et de la Corée. Elles nous permettent d’appréhender de manière plus précise l’arrière-plan des événements se trouvant au cœur des récits. Je tiens à remercier très chaleureusement Danielle Elisseeff, David Serfass, Victor Louzon, Fu Si-tai (傅思台), Alain Delissen, Isabelle Thireau, Xiaohong Xiao-Planes (萧小红), Michel Bonnin, Philippe Chevalerias et Chantal Zheng d’avoir accepté de participer à ce projet.

Le travail d’adaptation des textes en chinois s’est avéré particulièrement long et difficile. Je suis particulièrement reconnaissante à mes amis et collègues qui m’ont aidé à le mener à bien. Je salue notamment Hsieh Chwenching謝淳清, Yan Ai-lin顏艾琳, Liu Chanyueh劉展岳, Liu Si刘思 et Hsu Demin徐德敏. Par ailleurs, afin de respecter les pratiques linguistiques et culturelles des jeunes Taïwanais et Chinois, ainsi que la singularité du contenu de leurs récits, j’ai choisi d’utiliser respectivement les caractères complexes et simplifiés.